Chemins d'Afrique VOL 1-No 2-June 2021

2021 Chemins d’Afrique

Mais j'ai surtout mis l’accent sur l'importance de la politique macroéconomique comme moteur essentiel d’une croissance économique en faveur des pauvres, sur la façon dont la stabilisation du prix du riz a contribué à ce record de croissance et sur la capacité qui en a résulté pour les ménages ruraux pauvres d'entrer dans l'économie de marché avec confiance. À la fin de mon exposé, le chef de la délégation nigériane a déclaré, sans ambages et de manière plaintive : « Professeur Timmer, au Nigeria, nous ne pouvons faire aucune de ces choses que vous avez expliquées comme étant nécessaires au succès de l'Indonésie !». Cette réponse reste gravée dans ma mémoire depuis des décennies. Il n'existe pas de solution miracle pour mettre fin à la pauvreté en Afrique. Mais toutes mes recherches, mes cours et mes conseils politiques m'ont convaincu que mettre fin à la pauvreté en Afrique n'est tout simplement pas possible sans une augmentation de la productivité dans l'agriculture qui débouchera sur une transformation structurelle réussie. Malgré des débuts prometteurs, aucun pays d'Afrique subsaharienne n'a réussi à maintenir une telle

transformation structurelle pendant les trois ou quatre décennies nécessaires pour transformer l'économie et réduire durablement la pauvreté. Les raisons de cette situation font l'objet de nombreuses analyses et de nombreux débats, mais mon point de vue est celui-ci : le problème fondamental, c’est l'incapacité de l'économie urbaine moderne africaine à extraire la main-d'œuvre excédentaire de l'agriculture pour l'affecter à des emplois de production et de services à forte productivité. La raison de cet échec semble justifier le coût élevé de faire les affaires dans la plupart des économies africaines, ajouté à cela un horizon d'investissement très court (des mois, et non des années ou des décennies), causé par l'instabilité économique et politique. Ces deux facteurs nécessiteront des décennies pour être résolus, mais l’une des composantes majeures du coût élevé pour les affaires est le prix de l'énergie. Ces coûts élevés d'énergie découlent de l’instabilité et du coût élevé de l'électricité fournie par les réseaux nationaux, de la faible production mais aussi du manque de fiabilité des engrais et des installations d'irrigation à forte

intensité énergétique, de la pénurie de chambres froides efficaces dans les zones rurales et des coûts de transport élevés des zones rurales vers les zones urbaines. Il existe désormais d'importantes possibilités à court termede réduirecescoûtsénergétiques. Lespanneaux solaires alimentent déjà une grande partie du système de télécommunication local. Les téléphones portables servent de banques, de systèmes d'information sur les marchés qui permettent d'accéder à des spécialistes de l'agriculture, et bien évidemment, ils constituent un réseau de communication efficace. Les systèmes locaux d'irrigation alimentés par les panneaux solaires ont un impact sur la productivité agricole, notamment pour les cultures spécialisées. L'efficacité des réseaux électriques locaux, qui ne dépendent pas de réseaux nationaux coûteux et peu fiables, augmente rapidement. Une énergie bon marché et fiable pourrait être le catalyseur dont l'Afrique a besoin pour lancer sa transformation structurelle, en commençant par l'économie rurale.

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Vol 1 • N° 2 • Chemins d’Afrique 2021

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