Chemins d'Afrique VOL 1-No 2-June 2021

Chemins d’Afrique

2021

L a mode, c’est bien plus que le vêtement. C’est une industrie qui crée de l’emploi et réduit la pauvreté. La peinture fait désormais partie de la mode. De même que la décoration intérieure, le mobilier de maison ou de bureau, la bagagerie, les parfums, les cosmétiques, etc. C’est beaucoup d’argent et beaucoup de bénéfices économiques, politiques et sociaux. En France, pays que nous connaissons bien, une étude du gouvernement a fait ressortir le poids significatif du secteur culturel, avec plus de 100 milliards d’euros d’apports directs et indirects à l’économie. Le soutien financier de l’Etat français à la culture est également très important car les élites et les hommes politiques français savent que les manifestations culturelles soutenues par les collectivités publiques génèrent des retombées économiques positives pour les territoires concernés. L’industrie culturelle contribue aussi au rayonnement international et à la réputation du pays. L’Afrique n’a pas eu cette chance d’avoir des présidents et des grands ministres de l’éducation qui comprennent ces secrets-là. Nos dirigeants africains sont souvent mal conseillés. S’ils savaient que la culture ou la mode sont des vecteurs de développement, nos pays seraient très avancés. Les Européens l’ont bien compris, eux qui viennent s’inspirer du continent africain. Ils viennent en Afrique, s’inspirent de nos créations et prennent tout ce que nous avons : le textile, la bijouterie, la maroquinerie, les essences de parfums, les cosmétiques… Ils ont compris l’intérêt de la mode comme industrie. Je crois aux vertus de l’éducation des élites et des acteurs culturels eux-mêmes. Sans elle, on ne peut rien à voir. Malheureusement, l’Afrique a été délaissée dans ce domaine. C’est à travers l’éducation que l’on peut emmener les jeunes Africains à se former comme techniciens et ingénieurs travaillant dans tous les domaines de la création (stylistes-couturiers, ingénieurs de production et techniques de fabrication, etc.). La mode, c’est aussi complexe que l’architecture. Un bon vêtement, bien conçu, bien coupé et bien produit, ça requiert aussi une grande expertise technique. Une maison construite sans un bon architecte ne respecte pas les normes, la résistance des matériaux, la fiabilité et la solidité des alliages. Elle ne tarde pas à s’effondrer. Il en est de même de la mode. Nous devons mettre l’accent en priorité sur la formation. Les pays industrialisés ont étudié la mode et formé l’expertise dont ils avaient besoin. Nous ne le faisons pas. Nous aimons la mode et nous nous y lançons trop souvent sans y avoir de bases solides. Beaucoup de jeunes Africains voudraient migrer en Europe mais de très nombreux autres aimeraient rester au pays, se former, devenir des leaders dans différents domaines et contribuer au L’échec, c’est la réussite !

Alphadi Styliste, couturier Président de la Société africaine des créateurs de mode.

@AlphadiOfficial

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Vol 1 • N° 2 • Chemins d’Afrique 2021

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