Chemins d’Afrique
2021
Littérature et écologie en Afrique O n ne peut pas prouver d’une manière irréfutable que la dégradation de l’environnement dans le monde est la cause première du réchauffement climatique. Mais les données scientifiques et les statistiques mettent en évidence cette dangereuse dérive. Plus aucun pays ne semble exempt de catastrophes « naturelles », même si la sévérité des conséquences varie d’une zone géographique à l’autre. La relation des êtres humains à la nature est si désastreuse qu’elle est devenue un danger réel pour l’avenir de notre espèce. La fragilité de l’existence n’a jamais été aussi évidente. Des historiens nous rappellent qu’une civilisation, aussi grande soit-elle, peut disparaître si ses ressources s’épuisent. Ce fut le cas, entre autres, des Grecs, des Romains et des Mayas. Dans son livre Effondrement (2006), Jared Diamond démontre que ce sont des problèmes liés à une exploitation excessive de la nature qui semblent avoir entraîné la chute de ces civilisations : déforestation, érosion des sols, chasse ou pêche excessive, introduction d’espèces allogènes, croissance démographique trop forte et, plus généralement, l’augmentation de l’impact humain par habitant. De grands hommes scientifiques, tel que le célèbre physicien britannique Stephen Hawking, prédisent que la race humaine devra quitter la Terre d’ici 2600, quand elle en aura épuisé les ressources. Il est à parier que l’Afrique ne fera pas partie du voyage spatial. Il y a une corrélation indéniable entre l’épidémie d’Ebola qui a touché la Guinée, la Sierra Leone et le Liberia à la fin de 2013 et la déforestation importante que ces pays ont subie. Tout comme en République démocratique du Congo, où le virus a été découvert pour la première fois en 1976, les forêts ont été rongées. Ce phénomène ne date pas d’aujourd’hui. Les plus grandes exploitations forestières ont été établies pendant les colonisations successives, lorsque l’exportation des essences rares en Europe a commencé. L’aide internationale a mis du temps à se mettre en place lorsque l’épidémie d’Ebola s’est déclarée. Il a fallu attendre que des personnes contaminées prennent l’avion et que, dans le même temps, des membres du corps médical étranger ayant travaillé
Véronique Tadjo Grand Prix Littéraire d’Afrique Noire (2005). Ancienne chef du département de français de l’Université du Witswatersrand à Johannesburg.
@VTadjo
110
111
Vol 1 • N° 2 • Chemins d’Afrique 2021
Powered by FlippingBook