2021 Chemins d’Afrique
l’école secondaire ou le collège et qui travaillent dans des activités à faible productivité du secteur informel. Les objectifs des politiques publiques ne doivent pas conduire à reléguer de façon mécanique des élèves dans les filières éducatives existantes, mais plutôt à les encourager et les orienter vers les choix qui sont les meilleurs pour eux dans le contexte des circonstances économiques du moment et des perspectives à moyen terme. Dans les pays dont les économies sont les plus performantes, les éducateurs mettent de plus en plus l’accent sur les classes d’orientation, les compétences recherchées par l’industrie, les formations d’apprentissage et les programmes internes qui relèvent de la catégorie « orientation de carrière et enseignement technique ». Aux États- Unis, par exemple, les acquis de carrière et certificats industriels sont de plus en plus considérés comme un signe de diplôme d’études secondaires pertinent. De plus, les apprentis peuvent obtenir des crédits académiques en vue d’un diplôme de collège pour les compétences acquises au cours de leur formation professionnelle. Les politiques publiques devraient donc appuyer les efforts des collèges et autres institutions d’enseignement supérieur pour intégrer des programmes d’apprentissage dans leurs programmes d’études. Pour les travailleurs ayant déjà un emploi mais courant le risque de voir leurs compétences dépassées, il faut envisager des programmes de formation à l’emploi. Ces programmes, parrainés par les pouvoirs publics, sont conçus en étroite collaboration avec le secteur privé pour encourager le développement de compétences ou la préparation à l’espace de travail, et pour améliorer les revenus ou l’employabilité des travailleurs. Ils ne comprennent pas diverses formes d’aides ou de programmes de prêts aux étudiants. Les programmes d’apprentissage sont définis généralement comme un arrangement qui inclut une composante de travail rémunéré et une composante éducative pour acquérir connaissances et compétences recherchées par le marché du travail. Ils constituent une solution particulièrement efficace pour aborder les nombreux problèmes auxquels font face les jeunes Africains sans emploi ou en situation de sous-emploi. Ils ont pour objectif d’encourager une éducation financièrement accessible et des emplois décents, en particulier pour les jeunes. Traditionnellement, leur durée varie entre un et cinq ans. Ces programmes peuvent déboucher sur des diplômes académiques de valeur reconnue tels que des licences ou des maîtrises. Ils sont mis en œuvre par des prestataires de formation mais aussi
des employeurs qui paient un salaire et les frais d’inscription des apprentis, leur permettant ainsi de gagner leur vie tout en apprenant. Pour les étudiants et les jeunes, les programmes d’apprentissage offrent les avantages d’un diplôme sans la dette souvent associée avec la passerelle classique que constituent les collèges et universités. Ils combinent la formation par la pratique avec l’enseignement académique, offrant ainsi aux jeunes un passage vers des carrières où ils peuvent réussir. Pour les employeurs, les programmes d’apprentissage sont des instruments à faible coût pour remédier à un déficit de compétences, attirer et retenir des talents, et enrichir l’entreprise de nouvelles idées, en particulier lorsque les jeunes apprentis apportent avec eux des talents numériques substantiels dans des entreprises dont les travailleurs sont plus âgés. En résumé, les programmes d’apprentissage sont véritablement efficaces pour l’apport de compétences dans une entreprise et pour démarrer des carrières solides. Les apprentis gagnent des salaires décents à partir de leur premier jour de travail (un salaire susceptible d’augmenter au fur et à mesure qu’ils acquièrent de nouvelles compétences). Ils acquièrent des connaissances au travers d’un enseignement structuré ainsi qu’une formation à l’emploi et, une fois le programme accompli, enrichissent leur curriculum vitae de compétences reconnues par l’industrie. Les programmes d’apprentissage ont souvent donné de bons résultats, y compris dans les économies les plus avancées dans lesquels les jeunes ne sont pas toujours entrés sur le marché du travail après une formation dans des universités ou des collèges traditionnels. Par exemple, des programmes d’apprentissage bien conçus et bien gérés ont joué un rôle essentiel pour aider les compagnies allemandes à rester les leaders mondiaux de la transformation industrielle de haute qualité malgré une concurrence mondiale intense. L’approche allemande combine avec efficacité plusieurs éléments : des méthodes de formation qui ont démontré leur efficacité, des partenariats solides et mutuellement bénéfiques entre des compagnies privées et des établissements d’enseignement, et l’engagement des entreprises dans ces programmes, malgré la nécessité pour ces entreprises d’y contribuer financièrement. D’autres économies avancées comme celle des États- Unis ou du Royaume-Uni ont également lancé des programmes d’apprentissage réussi. Dans certains états des États-Unis, tels que la Caroline du Nord, des conseillers de l’enseignement secondaire ont même organisé des « foires pour les indécis » (undecideds fairs) pour exposer leurs élèves à des possibilités
d’emploi autres que celles nécessitant quatre ans de collège. Au cours de ces événements, les élèves ont l’occasion d’écouter des présentations de recruteurs venant de l’armée, de collèges communautaires ou d’entreprises offrant des emplois à la sortie de l’école secondaire. Certains de ces élèves participent à des concours dans l’espoir d’obtenir un apprentissage avec salaire, les frais de scolarité de collèges communautaires leur permettant d’étudier des sujets spécifiques tout en travaillant, et une passerelle vers un emploi lucratif. Quelques pays africains ont timidement lancé des programmes semblables, mais avec moins de succès. Malheureusement, la formation de travailleurs pour des industries non compétitives ou pour des secteurs sans bonnes perspectives d’avenir ne suffit pas à convaincre les employeurs de recruter. En plus de ne pas cibler des industries ayant des avantages comparatifs réels ou latents, ces programmes n’étaient en général pas conçus en étroite collaboration avec le secteur privé et n’étaient pas dotés d’un financement suffisant. Par conséquent, ils se sont avérés incapables de mettre en relation de jeunes Africains au chômage avec des vacances d’emploi, ni de les préparer à monter leurs propres affaires dans de nouvelles industries prometteuses. Un remaniement des programmes d’apprentissage et une réforme des programmes d’éducation et de développement de la main-d’œuvre (jugés désormais inefficaces), pourraient aider à corriger les erreurs politiques du passé. Ce remaniement pourrait permettre à plus de jeunes africains ayant des niveaux d’éducation variés d’acquérir des compétences pertinentes et de trouver des emplois bien payés. Lorsqu’ils sont bien conçus (en collaboration avec le secteur privé), bien exécutés et financés de façon durable, les programmes d’apprentissage fournissent des expériences pertinentes pour le marché de l’emploi, et l’occasion de développer des compétences reconnues par les employeurs. Ils offrent également des passerelles crédibles et financièrement accessibles vers des emplois décents et, souvent contribuent à l’émergence de jeunes entrepreneurs. Accompagnés de réglementations appropriées, des programmes de formation à l’emploi peuvent être développés par des tiers tels que des associations commerciales ou industrielles, des entreprises, des organismes non lucratifs, des syndicats, ou des organismes regroupant main-d’œuvre et direction. Les gouvernements devraient encourager les programmes d’apprentissage auprès des leaders du monde des affaires pour toutes les industries
concurrentielles, l’agro-industrie, l’industrie légère, l’infrastructure et les travaux publics, le tourisme et les services commerciaux, les TIC, le commerce numérique, la cybersécurité et les soins de santé. y compris Pour assurer la transparence du ciblage des industries bénéficiaires, et pour atténuer les risques d’une capture par l’État ou d’un gaspillage des fonds publics, les réglementations devraient permettre à un comité indépendant d’experts d’évaluer la crédibilité et la viabilité de tous les programmes d’apprentissage et de formation à l’emploi proposés. Le mandat de ce comité serait : • D’évaluer la capacité de tierces parties à récompenser les programmes d’apprentissage de haute qualité (programmes d’apprentissage dont la valeur est reconnue par l’industrie). • D’établir les directives ou critères que les tierces parties qualifiées doivent suivre pour assurer que les programmes d’apprentissage qu’ils récompensent satisfont àdesstandardsdequalité. • De déterminer quels sont les programmes d’apprentissage reconnus par l’industrie susceptible de bénéficier d’une procédure d’enregistrement accélérée et simplifiée sous le patronage du gouvernement. Et • D’établir un processus d’examen pour évaluer les requêtes et déterminer le bien-fondé d’une accréditation ou d’un enregistrement au titre de programmes d’apprentissage et de formation à l’emploi, et éventuellement mettre fin à ces programmes si nécessaire. Comme d’autres régions du monde, l’Afrique connaît une transformation sociopolitique profonde qui reflète mais aussi stimule le besoin et le désir d’un changement économique en profondeur. La plupart des jeunes au chômage qui manifestent dans les rues sur le continent africain et font souvent tomber des régimes autoritaires bien établis en quelques jours, ont de nombreuses demandes dans leurs agendas. Ils veulent en particulier des emplois solides et décents pour les aider à échapper à la pauvreté et vivre avec dignité. L’emploi des jeunes est en effet essentiel à un développement inclusif et à la stabilité sociopolitique dans la région. L’Afrique compte la population la plus jeune du monde mais le taux de chômage des jeunes y est le plus élevé. Cet emploi des jeunes est également essentiel à la stabilité, à la paix et à la sécurité dans le monde.
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Vol 1 • N° 2 • Chemins d’Afrique 2021
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