Chemins d'Afrique VOL 1-No 2-June 2021

2021 Chemins d’Afrique

investissements, réhabilitation ou maintenance) éliminent les obstacles à la croissance et créent les conditions d’une productivité accrue. L’accélération de la mise en œuvre de projets d’infrastructures productives, prêts à démarrer et à forte intensité de main-d’œuvre, devrait être une priorité. Les dépenses en infrastructures productives qui éliminent les goulots d’étranglement de la croissance (avec de bons taux de rendement) ainsi que les dépenses d’exploitation et de maintenance peuvent à la fois stimuler la demande et générer à long terme des sources de croissance. Des subventions salariales peuvent également être envisagées pour les industries clairement concurrentielles, mais confrontées à des chocs temporaires. Cela permettrait aux employeurs de continuer à payer leurs salariés, au lieu de

Des programmes de formation destinés à aider les travailleurs, nouveaux ou ayant perdu leur emploi, à acquérir ou à retrouver des compétences pourraient accroître la productivité si ces programmes ciblaient les groupes les plus démunis (les jeunes, les personnes défavorisées et les femmes). De bons résultats pourraient être obtenus par des programmes destinés aux jeunes, conçus en étroite collaboration avec des entreprises privées (afin de déterminer les compétences requises) et qui pourraient proposer des programmes de formation sur mesure. Pour garantir le maximum de chances de réussite, ils doivent être adaptés dans chaque pays aux besoins des industries potentiellement compétitives. Il est particulièrement nécessaire de financer des projets rentables d’infrastructure car les avantages pour la société dans son ensemble

D’une part, elles fournissent aux économies un financement à long terme dont elles ont grandement besoin, contribuant ainsi à l’expansion et à la modernisation des infrastructures (énergie, transport, télécommunications, approvisionnement en eau), et d’autre part, elles permettent de préserver un équilibre budgétaire durable. Le renforcement du rôle financier et économique de ces banques n’obligerait pas les gouvernements des pays en développement à accroître sensiblement leurs emprunts. La revitalisation des banques publiques d’investissement et de développement stimulerait la confiance en soutenant des projets et programmes d’investissement régionaux à grande échelle à même de créer des opportunités d’emplois. Toutefois, ces investissements devraient être faits par le secteur privé ou par certaines administrations locales, les fonds nécessaires étant empruntés ou mobilisés par les banques d’investissement et de développement et non par les gouvernements. La revitalisation de ces institutions financières contribuerait grandement à remédier aux défaillances à court terme des marchés de capitaux privés qui empêchent les économies pauvres d’obtenir du financement pour leurs projets de développement. En mettant à disposition des financements à long terme pour des investissements judicieux, les banques d’investissement et de développement pourraient soutenir de nouvelles industries exportatrices qui réduisent la dépendance à l’endettement étranger pour le financement de produits étrangers. Les gouvernements pourraient les utiliser pour obtenir des lignes de crédit spéciales et pour inciter les banques commerciales à offrir à leur tour des conditions d’emprunt plus favorables aux entreprises dans des secteurs et des industries potentiellement concurrentiels. Cela ouvrirait également de nouvelles possibilités pour le développement de nouveaux produits et services par les banques commerciales (y compris des facilités d’assurance contre les risques de change). Bien que les banques de développement et les banques publiques d’investissement aient un piètre bilan dans les pays en développement, il convient de noter que leurs échecs pourraient également être imputés à la poursuite aveugle de projets à forte intensité de capital (modernisation) qui n’étaient pas économiquement viables au départ ou qui étaient mal gérés sans modifications pour refléter les changements dans la structure de l’économie. Tirant les leçonsdeséchecsetdessuccèsdupassé, les nouvelles institutions financières de développement emprunteraient sur les marchés des capitaux pour

financer des projets économiquement viables dans des industries et des secteurs potentiellement concurrentiels. Ils offriraient une garantie partielle ou totale du remboursement des obligations émises par des projets d’investissement en supportant le risque, ce qui réduirait considérablement le coût des financements. Les institutions financières de développement nouvellement réaménagées, fonctionnant dans un cadre rigoureux, professionnel et transparent, émettraient également leurs propres obligations à long terme avec une prime modeste par rapport aux bons du Trésor américains pour lever des fonds et financer directement des projets de grande envergure. De bonnes stratégies institutionnelles et de gouvernance permettraient aux banques de développement et aux banques publiques d’investissement de financer de grands projets d’infrastructure tout en évitant systématiquement les pertes et en maintenant un taux de défaillance très faible. L’accès à un financement stable à un coût raisonnable est une condition préalable à la performance des entreprises et à la croissance économique. Au niveau microéconomique, les producteurs locaux dans les industries potentiellement compétitives doivent encore payer d’avance en devises étrangères pour leurs équipements et intrants importés et supporter les coûts souvent élevés du risque de change associé à une dépréciation de la monnaie nationale. Les entrepreneurs hésitent donc à faire les gros achats dont ils auraient besoin pour devenir des producteurs viables sur la scène mondiale. Dans la plupart des pays africains, les banques locales n’accordent pas de taux d’intérêt préférentiels aux grands investisseurs, et les taux d’intérêt sont assez élevés (généralement plus de 20 %). La simplification des procédures commerciales, l’accroissement de la transparence et de la prévisibilité des politiques commerciales et la réduction du coût des formalités aux frontières peuvent également contribuer à la création d’emplois en Afrique60. La plupart des pays africains devraient revoir leurs systèmes de permis et licences d’importation et d’exportation et en réduire les conditions et coûts d’obtention. Ils devraient également harmoniser les politiques frontalières conformément aux engagements pris dans le cadre de la Zone de libre- échange continentale africaine (AfCFTA). Il ne s’agit pas nécessairement d’un programme de déréglementation, mais plutôt d’une meilleure réglementation permettant au gouvernement d’atteindre ses objectifs en matière de politique publique tout en réduisant au minimum les contraintes pesant sur le commerce. Cela nécessiterait la

les licencier pour cause économique, ainsi que d’embaucher des jeunes travailleurs ou des femmes en payant une partie de leur

sont généralement importants. Or, le processus de sélection et d’allocation des fonds aux projets d’infrastructures

salaire sur une période donnée. Les subventions salariales permettent à ces travailleurs d’acquérir ou de développer les principales compétences susceptibles de leur apporter un emploi à long terme. Cependant, certains employeurs

publiques les soumet aux pressions politiques et aux risques d’accaparement

des ressources par l’élite dirigeante. Dans les pays instables ou sous l’autorité de régimes autoritaires, la faiblesse du cadre institutionnel, les règles budgétaires floues, le manque de transparence et l’absence de mécanismes de reddition de comptes, ainsi que le besoin de satisfaire la clientèle politique à tous les niveaux de gouvernement et au-delà, peuvent conduire à des prises de décision

pourraient considérer ces subventions comme une simple source temporaire de main-d’œuvre bon marché. C’est pourquoi le risque de pertes sèches devrait également être pris en compte.

Les gouvernements doivent donc faire preuve de prudence dans la détermination du niveau et de la durée des subventions, car le recours massif au recrutement dans le secteur public, source d’emplois et de revenus, a souvent de profondes conséquences sociales et culturelles et dure parfois plus qu’il ne devrait. Certaines régions peuvent être engluées dans une situation de dépendance où les emplois du secteur public sont devenus la seule source de revenus et où les opportunités de développement du secteur privé ne peuvent se concrétiser. Cette situation crée un cercle vicieux autoalimenté qui décourage l’entrepreneuriat et renforce la dépendance à l’égard du gouvernement. Il en résulte souvent la création de puissants groupements politiques de fonctionnaires et de syndicats opposés aux réformes du marché du travail.

aléatoires et coûteuses.

Beaucoup de pays africains se trouvent actuellement confrontés à des difficultés de financement. Il leur est quasiment impossible d’accroître substantiellement les déficits publics, notamment en raison des contraintes liées aux programmes du FMI. Il faut dès lors mettre en œuvre une stratégie de financement du développement qui soutienne la demande sans créer de déficits budgétaires insoutenables. Une solution viable aux problèmes de financement des infrastructures serait de renforcer les banques de développement et les banques publiques d’investissement nationales et régionales africaines. Des banques de développement performantes aident les pays à atteindre simultanément deux objectifs.

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